Les procès

                                              

Le mot de sorcellerie évoque facilement des images comiques ou sinistres de vieilles femmes chevauchant des balais avec leurs chats noirs. Plus sérieusement, on l'associe aux siècles durant lesquels tant de gens furent pendus ou brûlés vifs pour commerce avec le diable. Mais, les sorcières ne seraient-elles pas le fruit de notre imagination, des femmes que l'on aurait accusées à tort de provoquer les forces du mal, celles sur qui on aurait reporté nos craintes et nos peurs? Les sorcières ne seraient-elles pas de simples victimes de l'ignorance de leur époque? C'est ce que je tenterai de démontrer.La jalousie, les différences et la recherche d'un coupable afin d'expliquer certains événements inexplicables étaient tous des motifs d'arrestation très fréquents à cette époque. Dans ce travail, je vais donc tenter, à l'aide de ces éléments, de démontrer que la plupart des sorcières étaient accusées pour des motifs peu valables.

Les origines de la sorcellerie remontent à la nuit des temps. Longtemps perçue comme inspirée du démon, elle n'est en fait que le reflet des craintes et des haines les plus poussées d'une société.On croyait que la sorcière avait le pouvoir, avec l'aide du démon, de tourmenter tous ceux qu'elle voulait. Elle pouvait rendre ses victimes sujettes à l'étouffement, au dépérissement, aux meurtrissures, aux contusions, aux douleurs, aux maladies, à la torture ou même à la mort. Par un retournement de situation, la réalité a démontré que ce sont les sorcières elles-mêmes qui ont souffert de tous ces maux, alors qu'il n'y avait aucune preuve que des personnes aient pu souffrir des mauvais sorts qu'elles auraient jetés. La signature du pacte avec Satan retranchait les sorcières de la communauté chrétienne. Leur choix supprimait toute idée de pardon. Cette signature impliquait la renonciation aux avantages du baptême, obligeait à changer de nom et à subir l'attouchement physique du démon (marque diabolique). Satan les marquait tout en les baisant et mordant, parce qu'il leur voulait faire entendre par ce moyen qu'elles étaient pour l'avenir à lui. L'existence de cette marque ne pouvait laisser aucun doute sur la culpabilité de la sorcière. La sorcière devait abjurer la foi catholique, renoncer au Christ et à Marie et fuir les sacrements; elle devait payer hommage au démon au cours de cérémonies obscènes, et elle s'engageait à recruter d'autres personnes; elle devait aussi recevoir un nouveau baptême et échanger son nom contre un surnom. En signe de vassalité, elle offrait au démon un morceau de ses vêtements. Dans un cercle magique dressé par le diable, la sorcière renouvelait son hommage. Elle demandait au diable de la rayer du Grand Livre du Christ et de l'inscrire dans son Grand Livre noir. Elle promettait ainsi au démon des sacrifices et des offrandes au démon. Cette relation avec l'esprit du mal expliquait l'application de la torture envers les sorcières. La torture répondait à un triple objectif: elle provoquait l'expression d'aveux directs que les magistrats avaient été incapables d'obtenir jusqu'alors, elle aboutissait à l'énoncé d'une liste, fantaisiste mais parfois réelle, de prétendus complices. La torture satisfaisait ainsi la curiosité des juges et leurs passions sadiques. Plusieurs techniques étaient utilisées afin de déterminer si une sorcière en était bel et bien une. Les examinateurs pouvaient piquer le corps de l'accusée avec une grosse épingle afin de trouver un point de sa chair qui ne saignerait pas ou qui ne serait pas douloureux. Si l'accusée ne pouvait pleurer, cela prouvait sa culpabilité, car les vraies sorcières ne versent pas de larmes. Les grains de beauté, les cicatrices et les points cutanés insensibles pouvaient être qualifiés de diaboliques.
Le recours à l'eau froide était une technique fréquemment utilisée. Une croyance disait que les sorcières ne pouvaient aller au fond de l'eau car, semble-t-il, l'eau refusait de recevoir les personnes ayant renoncé aux avantages du baptême. Le Brun raconte ainsi l'expérience, L'épreuve de l'eau froide se faisait de cette manière : on dépouillait entièrement la personne, on lui liait le pied droit avec la main gauche et le pied gauche avec la main droite, de peur qu'il ne pût remuer; et la tenant par une corde, on la jetait dans l'eau. Si elle allait au fond, comme y va naturellement une personne ainsi liée, qui ne peut se donner aucun mouvement, elle était reconnue innocente, mais, si elle surnageait sans pouvoir enfoncer, elle était coupable. D'un côté la noyade, de l'autre la grillade, elle n'en réchappait pas.

La légèreté était aussi un signe d'appartenance aux légions infernales. Pour voler dans les airs, d'après la croyance de l'époque, les sorcières devaient être d'une légèreté surnaturelle. Les procédés variaient d'une ville à l'autre. Dans tel village, la suspecte était pesée avec la grande bible de l'église; si le plateau penchait en sa faveur, elle était déclarée innocente. Ailleurs, on pouvait exiger l'équilibre parfait avec un poids déterminé, chose presque impossible, ce qui valait à la suspecte un verdict de culpabilité.
Outre la pesée, la flottaison et la recherche de marques diaboliques, plusieurs autres signes pouvaient servir de preuve pour l'accusation. Trois types de signes existaient : les signes non garantis, comme les yeux déformés et l'absence de pleurs, les signes probables tels que l'hérédité, la vie scandaleuse et méchante, des soupçons très violents de sorcellerie à l'égard des accusées, la cruention des cadavres sous leurs yeux et la présence de marques, et finalement, les signes infaillibles comme le mépris des sacrements, la malignité à l'égard du monde environnant, la recherche de complices, la présence à des assemblées nocturnes et l'infamie.
Lorsqu'une sorcière était reconnue coupable de sorcellerie, plusieurs traitements pouvaient lui être réservés: le supplice de la crémation lente, qui consistait à suspendre, par des menottes et par des chaînes, les condamnées qui rôtissaient à petit feu, le bûcher et la pendaison étaient des châtiments très souvent imposés afin d'éliminer les sorcières.
L'arbitraire comptait beaucoup plus dans les procès de sorcellerie et dans les jugements rendus par les juges que l'analyse des faits.
Après avoir étudié les faits, les témoignages de victimes et les causes de la sorcellerie, je crois pouvoir affirmer que les sorcières n'en étaient pas vraiment. En fait, elles ont été les victimes de leur époque. De la jalousie des autres jusqu'à l'ignorance envers certains phénomènes inexplicables, n'importe quelles raisons, même farfelues, étaient évoquées pour condamner la sorcière accusée. Ce qu'elles avouaient sous la torture n'était pas nécessairement vrai. N'importe qui, pour éviter des souffrances toujours plus cruelles, aurait raconté ce que les juges voulaient bien entendre. L'époque dans laquelle se sont déroulés ces événements créait aussi l'environnement nécessaire pour de tels excès. Les différences d'ordre physique tels les grains de beauté ou les cicatrices ne pouvaient être considérées comme des preuves valables. Tout était contre elles. Les tests impossibles à réussir, les jugements préalablement faits dans la tête des juges, tout contribuait leur culpabilité.

Si on la compare à la société d'hier, la société d'aujourd'hui fait preuve de beaucoup plus de tolérance et de compréhension. Notre société accepte plus facilement les différents phénomènes, que ce soit les médecines naturelles, la délinquance ou encore les différences d'ordre religieux, sexuel et physique. Il en est de même pour tout ce qui a trait aux différents rites et langages des sectes dont plusieurs s'apparentent à des actes de pure sorcellerie. La société moderne, principalement occidentale, a atteint un haut niveau de culture qui lui permet de démystifier ces pratiques. Mais la tolérance de cette société ferait-elle de nouvelles victimes?

par Joëlle Malenfant

A partir du XIXe siècle apparaissent de nouveaux procès. Ainsi en 1875, le laboureur Henri Blancher est condamnépour exercice illégal de la médecine, malgré les nombreuses lettres quiviendront témoigner, lors de son procès, de l'efficacité des pratiques de cet homme surnommé le "Bon Dieu" !
Ainsi également de la célèbre et très appréciée Marie Petit, dite la "dormeuse de Charost", condamnée, tout comme ses parents, à 6 mois de prison pour exercice illégal de la médecine, en 1858.
( Détours en France n°39 bis 1998 )                                                        

                                                                                      

 



30/04/2007
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