L'enfant hyperactif présente des troubles de l'attention, de la perception, de la conceptualisation, du langage, de la mémoire, de la coordination et des dyspraxies qui entraînent une incapacité ou un retard d'apprentissage.
Le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux mis au point par l'American Psychiatric Association décrit le trouble déficitaire de l'attention, dont il distingue deux sous-groupes : les troubles déficitaires de l'attention avec hyperactivité - qui concerne par conséquent ce que l'Ecole Française baptise d'instabilité psychomotrice - et les troubles déficitaires de l'attention sans hyperactivité, qui élimine par conséquent de cette catégorie les enfants hyperactifs.
Pour que ce diagnostic puisse être retenu, les symptômes d'inattention doivent persister au moins six mois au cours desquels on retrouve six ou plus des signes suivants :
En ce qui concerne l'hyperactivité et l'impulsivité, six ou plus des signes suivants doivent persister au moins durant six mois :
Dans ce cadre très vaste, sont regroupés de nombreux enfants dont on dit qu'ils ne tiennent pas en place, qu'ils papillonnent d'un endroit à l'autre, fatiguant l'entourage et s'épuisant eux-mêmes.
Certains spécialistes parlent de "dysfonctionnement cérébral minime" , d'autres de "troubles spécifiques d'apprentissage", d'encéphalopathie "a minima", de syndrome cérébral chronique, de syndrome de Strauss, de syndrome choréiforme de Prechtl, de handicap de perception, d'enfant maladroit, de retard de maturation, d'instabilité organique, de troubles de l'attention etc...
En réalité, on regroupe dans ce cadre :
Cette définition pourrait correspondre à tous les enfants, tant il est vrai que cette instabilité psychomotrice est habituelle chez l'enfant de 1 à 4 ans.
A partir de quand faut-il s'en inquiéter ?
C'est là tout le problème...! Tout dépend de la tolérance des parents, du médecin, de l'instituteur... Comment séparer le normal du pathologique ?
La manifestation, dans le comportement, qui différencie l'enfant hyperactif de l'enfant normal est l'impossibilité à soutenir l'attention sur des tâches et des buts déterminés. Elle s'accompagne de lassitude, de manque de concentration, d'étourderie, de maladresse, de troubles de l'apprentissage de la lecture.
Les garçons sont 4 fois plus touchés que les filles. 1 à 10% des enfants d'âge scolaire sont classés dans ce cadre. Certains spécialistes estiment que 10% des écoliers âgés de 5 à 12 ans sont hyperkinétiques. D'autres parlent d'un enfant par classe.
En général, les capacités de concentration de ces enfants évoluent après 5 ans et une amélioration notable du comportement apparaît vers 8 ans. Toutefois, il peut subsister un certain nombre de problèmes comportementaux et de difficultés de perception. Tendance à la distraction, agressivité et immaturité affective peuvent demeurer.
L'hérédité semble être un facteur déterminant et on retrouve souvent, dans les antécédents familiaux de l'enfant hyperactif, un parent ayant présenté les mêmes symptômes.
On pressent un certain nombre de causes fondées sur des antécédents de complications pré ou périnatales, ou de lésions, d'infections ou d'intoxications au cours de la première enfance.
Pour beaucoup de spécialistes, les anciens prématurés, surtout de poids de naissance inférieur à 1500 g (toxémie, malnutrition in utero, alcoolisme ou syndrome foeto-alcoolique, anoxie néonatale, ictère nucléaire...) seraient très souvent hyperkinétiques.
Le tabagisme de la mère, des conditions socio-économiques défavorables, des anomalies audiovisuelles, la phénylcétonurie, l'autisme, l'intoxication par le plomb (saturnisme), l'épilepsie temporale ont été incriminés. Les traitements par clonazépam, barbituriques, antidépresseurs tricycliques, chlodiazépoxyde pourraient jouer un rôle favorisant chez certains enfants présentant un trouble neurochimique héréditaire.
Les troubles de la glycémie ont été incriminés sans preuve. Le manque de vitamine B également. Une insuffisance du métabolisme des catécholamines a été évoquée. Un retard dans la maturation cérébrale dû à un ou plusieurs facteurs nocifs est également soupçonné.
Parfois, les symptômes se reconnaissent dès la naissance. Les nouveau-nés pleurent sans cesse, crient, s'agitent. Ils souffrent de coliques idiopathiques violentes et durables.
Durant toute leur première année, ce sont des enfants qui dorment mal et qui pleurent très souvent. Ils sursautent facilement.
A partir de 1 an, ce sont des enfants qui bougent sans cesse, ramassent les objets, les jettent, grimpent partout, donnent des coups de pieds, tombent sans arrêt, s'intoxiquent plusieurs fois de suite, ouvrent les portes puis les font claquer, touchent à tout, font du bruit.
Irritables, ils refusent qu'une chose ou une personne leur résiste. Ce sont des enfants exigeants, véhéments et maladroits qui n'acceptent aucune frustration sans faire de véritables crises de nerfs : ils trépignent et hurlent. Ils ne supportent pas de rester assis à faire un puzzle, à crayonner ou à regarder des images. Leur capacité d'attention est très limitée. Les problèmes de sommeil sont constants.
C'est à l'âge scolaire que se révèle, par comparaison, avec les autres enfants du même âge, l'instabilité psychomotrice. Le comportement hyperactif est un degré inhabituel d'agitation motrice sans objet et non dirigée vers un but spécifique et intentionnel. Cette activité excessive interrompt l'attention et la concentration de l'enfant et gêne son aptitude à effectuer des travaux structurés. L'enfant a du mal à rester assis sur son banc. Son attention est détournée par le moindre petit bruit. Il ne peut se concentrer sur son activité scolaire. Cette impossibilité à fixer son attention est toutefois sélective : il réussit sans peine à le faire sur un jeu vidéo ou une émission TV.
Ce manque de concentration se voit aussi dans son langage : l'enfant commence une phrase sans pouvoir la terminer car il a oublié de quoi il s'agissait.
Ce sont des enfants impulsifs qui ne prennent pas le temps de réfléchir avant d'effectuer un acte.
Ils ont une mauvaise coordination des mouvements. Ils sont incapables de faire deux actions à la fois, de reconnaître leur droite de la gauche (troubles de la latéralité), de lacer leurs chaussures, de s'habiller (difficultés practognosiques).
Les difficultés de concentration entraînent des difficultés pour l'apprentissage de la lecture, de l'écriture, de l'arithmétique, de la compréhension en général.
Ces enfants sont mal acceptés par leurs parents, leurs éducateurs et leurs camarades qui ont tendance à les laisser de côté. Ils ont "mauvais caractère", se mettent en colère pour un rien.
Ils souffrent de leurs échecs et cette souffrance augmente encore leur trouble du comportement. Ils peuvent même effectuer des actes répréhensibles qui sont comme un appel au secours.
Il est souvent nécessaire d'associer des conseils à la famille, une éducation contrôlée, une modification du comportement et un traitement médicamenteux.
Une évaluation psychologique est nécessaire avant de réaliser un programme thérapeutique. Les tests doivent évaluer :
Le traitement est surtout éducatif (traitement comportemental).
Les parents doivent fonder des espoirs réalistes sur l'enfant et éviter les situations difficiles où l'enfant court à l'échec. Ils doivent faire preuve d'amour et de compréhension, ce qui n'est pas toujours facile...!
Les parents doivent développer la mémoire auditive de leur enfant hyperactif. Il faut lui parler souvent, calmement, lentement, sans bruit autour d'eux, en donnant des ordres simples. Il est utile de renforcer les explications et exigences verbales par des gestes. Il faut utiliser des indications multiples (vue, audition, kinesthésie...) dans l'apprentissage.
Les mères se plaignent : "il n'écoute pas ce que je dis...!".
Il faut que ces mères se posent la question : comment parlent-elles à l'enfant ? Si ce sont quelques phrases prononcées sans prendre le temps de s'assurer que cela a été compris, c'est inutile...
Il faut organiser la vie de ces enfants qui ont besoin de stabilité, de routine calme et uniforme. L'enfant doit connaître les limites à ne pas franchir, savoir et respecter l'heure de se lever, de manger, de jouer, d'aller à l'école, de travailler, de se coucher. Il faut que l'enfant ait des activités régulières personnelles à faire : faire son lit, nourrir le chat, aller chercher le courrier etc...Il doit être encouragé à aller faire de petites courses : chercher le lait ou le pain chez l'épicier d'à côté (sous la surveillance des parents bien entendu). Il faut que l'enfant se sente utile, important et responsable. Une discipline adaptée est nécessaire.
Il est important de ne pas laisser l'enfant s'enferrer dans le sentiment qu'il n'est bon à rien, qu'il est un "raté" qui ne réussit et ne réussira jamais rien correctement. Les brimades, les moqueries, les disputes ne l'aident en rien. Les punitions l'enfoncent davantage et n'ont aucun intérêt éducatif. Il faut au contraire récompenser, encourager l'enfant lorsqu'au sein de ses actions maladroites, il réussit enfin à faire preuve d'un peu de "maturité". Il faut souligner ses activités positives pour lui donner confiance en lui. Tout le monde a besoin d'être récompensé pour ses efforts et la bonne volonté doit être reconnue, encouragée et félicitée. Il faut éviter les échecs et les expériences négatives dans l'apprentissage.
A l'école, l'enfant éprouve de grandes difficultés en raison de son manque de concentration et de ses problèmes spécifiques d'apprentissage. Il est important que l'enseignant s'en rende compte et juge autant l'effort que le résultat.
Lorsque ces problèmes d'apprentissage, de concentration, de synthèse, le manque de contrôle des émotions, l'impulsivité, le peu de résistance aux frustrations ne sont pas reconnus par la famille et les enseignants, on risque d'aboutir à de graves problèmes du comportement. L'enfant rejeté va succomber à un sentiment de désespoir et d'impuissance qui s'ajoutera à ses problèmes. Il ne faut pas les laisser se construire une image de "raté".
Les éducateurs et les parents doivent faire preuve d'imagination pour utiliser des moyens originaux et créatifs pour mobiliser les courtes possibilités d'attention de l'enfant. Il est nécessaire d'inculquer les principes de base et d'encourager les révisions avant d'aborder les problèmes plus complexes. Les activités doivent être brèves et ne pas dépasser les capacités d'attention soutenue de l'enfant.
En classe, il faut minimiser les distractions et éviter les stimuli visuels et auditifs parasites (classe réduite, environnement étudié etc.).
Les traitements médicamenteux sont très discutés.
Les psychostimulantes sont très utilisés aux Etats-Unis. Les plus utilisées sont le sulfate d'amphétamine, le sulfate de dextroamphétamine et le méthylphénidate hydrochloride. Certains auteurs considèrent même que leurs effets positifs sur l'hyperactivité sont un élément du diagnostic.
Il s'agit, pour ceux-ci, d'un traitement à court terme (de deux jours) basé sur les stimulants. Ce traitement n'implique, en aucune façon, un traitement à long terme à base de stimulants ; il aide simplement à classer l'enfant dans l'une des deux catégories : individu à réception positive face aux stimulants, ce qui est le cas des enfants hyperactifs typiques, et individu à réaction négative face aux stimulants, ce qui est le cas des enfants qui souffrent de troubles qui simulent l'hyperactivité.
Aux Etats-Unis plus de 90 % des hyperactifs prennent du méthylphénidate (Ritaline), de préférence à la dextroamphétamine, du fait de sa meilleure tolérance. D'après de nombreux auteurs américains, près de 75 % des enfants ainsi traités réagissent de façon positive à l'administration de Ritaline.
Ritaline
L'efficacité est rapide : en une heure l'enfant devient moins agité, moins impulsif, moins agressif, et plus attentif, plus coopérant. Ces effets positifs persistent pendant 4 heures environ. Dans certains cas on peut observer un effet de rebond et les difficultés de base réapparaissent.
L'effet maximum du médicament stimulant se situe deux heures après la première prise puis l'efficacité diminue pendant le 4 heures suivantes et le médicament doit être administré à ce moment, c'est-à-dire 6 heures après la première prise.
Certains enfants voient leurs symptômes réapparaître 6 à 10 heures après la première prise car l'effet du stimulant s'épuise. Les professeurs constatent les bons effets du traitement médicamenteux, en vantent les mérites alors que les parents, lorsque l'enfant revenu à la maison n'est plus sous l'emprise du médicament, sont beaucoup plus réservés. Professeurs et parents peuvent donc être d'un avis opposé.
Les stimulants contribuent à réduire l'hyperactivité, à améliorer l'attention , à augmenter la vigilance au bénéfice des tâches scolaires. Ils augmentent l'auto-contrôle et la maîtrise de soi. Une stricte surveillance et une estimation régulière permettent de définir la dose optimale. Les enfants peuvent d'eux mêmes en moduler les doses en fonction des effets ressentis. Les risques d'une telle automédication sont considérables et justifient de grandes réserves à ce propos. Une fourchette thérapeutique peut être prescrite pendant les périodes de congé.
Les médications stimulantes diminueraient les comportements négatifs, réduisant la fréquence des réprimandes et des punitions, rendant l'enfant plus sociable et mieux accepté.
Les effets de ces stimulants varient en fonction de l'âge. Les enfants hyperactifs, d'âge préscolaire, réagissent moins aux stimulants que les enfants plus âgés. Des effets négatifs ont été signalés : morosité, geignements, troubles du sommeil et anorexie. Aussi la plupart des médecins ne les prescrivent-ils pas à de jeunes enfants.
L'efficacité serait moindre chez les adolescents et, bien que la preuve n'en ait pas été faite, on a pu craindre que l'administration de ce type de drogue puisse entraîner une toxicomanie ultérieure.
En ce qui concerne les adultes, chez lesquels persistent des difficultés de concentration, une impulsivité et une irritabilité, la poursuite du traitement est préconisée par certains, mais non sans réserves.
Une stricte surveillance s'avère indispensable du fait des effets secondaires que les stimulants peuvent entraîner : au premier plan l'insomnie et la perte d'appétit.
D'autres effets secondaires ont été signalés : céphalées, douleurs abdominales ; ils sont rares, transitoires et cèdent facilement à la diminution des doses prescrites.
On peut observer l'apparition de tics et de mouvements compulsifs qui ne perdurent pas. Dans certains cas, on a pu observer l'exacerbation ou l'apparition d'une maladie de Gilles de La Tourette comprenant des tics touchant plusieurs groupes musculaires, des tics verbaux divers, tels que grognements, glapissements, coprolalie (impulsion à émettre des mots orduriers). Cette éventualité n'intervient que chez des enfants constitutionnellement prédisposés, qu'il conviendrait de dépister avant de prescrire des stimulants. De façon tout à fait exceptionnelle l'on a pu observer l'apparition d'hallucinations et de comportements discordants. Il s'agit alors, dans la plupart des cas, d'un mode d'entrée dans la psychose et d'une erreur de diagnostic de départ.
Le ralentissement de la croissance en taille et en poids a été signalée. Il est transitoire. L'arrêt du traitement pendant les vacances aidera à minimiser l'effet retentissant sur la croissance. Les études à long terme, portant sur 8 ou 10 années, auraient montré qu'il n'y avait pas eu d'effets sur la croissance staturale et pondérale.
L'influence à long terme de ces médicaments est difficile à démontrer.
Ce type de médicaments doit être manié avec une extrême prudence et beaucoup de médecins, particulièrement en France, se montrent à juste titre très réticents en la matière. La grande majorité d'entre eux ne les utilisent pas. A l'heure actuelle la Ritaline ne peut être prescrite que par un médecin hospitalier (pédiatre, neurologue ou psychiatre). La prescription nécessite en effet un bilan approfondi. Les renouvellements d'ordonnance par contre peuvent être faits par le médecin traitant.
Les contre-indications à ces traitements par stimulants du système nerveux central sont l'épilepsie et les comportements hyperactifs dus surtout à l'anxiété, à des réactions dépressives ou à d'autres états psychotiques. Leur usage modéré, pendant de courtes périodes ou par intervalles, peut aider l'enfant à se concentrer et améliore son état. Les effets secondaires potentiels (anorexie, insomnie, réactions dépressives, céphalées, gastralgies, ralentissement de la croissance) les font éviter le plus souvent en France.
Autres médicaments :
Les tricycliques améliorent l'hyperkinésie lorsque celle-ci est en rapport avec un état dépressif.
Ainsi l'imipramine (Tofranil) est efficace dans 75% des cas. Son action anti-dépressive a une action positive. L'utilisation des antidépresseurs présente plusieurs avantages sur les psychostimulants : durée d'action plus prolongée, pas de troubles du sommeil, cependant l'efficacité s'estomperait après 8 à 10 semaines de traitement.
La chlorpromazine (Largactil) ne peut être considérée comme traitement majeur de l'hyperactivité mais peut donner de bons résultats chez des enfants particulièrement violents.
La Fluoxétine (Prozac) donnerait des résultats positifs dans 50% des cas.
L'instabilité psychomotrice reste une indication discutée des neuroleptiques polyvalents : halopéridol (Haldol) ou sédatifs, thioridazine (Melléril).
Acide folique Ce produit aurait des effets positifs.. Beaucoup de familles considèrent que l'acide folique est préférable aux stimulants amphétaminiques du fait de son maniement plus aisé.
En cas d'instabilité psychomotrice, 87 % des médecins français ne prescrivent jamais ou rarement les psychotropes dont 41 % jamais avec, en cas de prescription, une préférence accordée aux neuroleptiques et aux anxiolytiques, les prescriptions de stimulants ou d'antidépresseurs étant plus rares, contrairement à la pratique des Anglo-saxons. Les effets positifs des médicaments qui réduisent l'hyperactivité aident les parents à moduler leurs réactions, souvent négatives, et à mieux accepter l'enfant.
La psychomotricité
C'est une aide intéressante.
Leur efficacité n'a pas été démontrée :
Le pronostic est relativement favorable chez l'enfant qui a un QI moyen ou supérieur à la moyenne et dont les problèmes de perception se limitent à la mémoire visuelle ou à une dysfonction perceptivo-motrice, lorsque le diagnostic est posé tôt et l'éducation adaptée à ses besoins spécifiques.
Le pronostic est nettement moins bon lorsque :
Didier-Jacques Duché : L'enfant hyperactif.
Collection "Vivre et Comprendre".
Editions Ellipses, Paris